Le budget 2019-2020 témoigne la faillite de l’État Haïtien, dixit Etzer ÉMILE.

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Le budget 2019-2020 témoigne la faillite de l’État Haïtien, dixit Etzer ÉMILE.

Jeudi 11 Juin 2020 – Le P’tit Journal.
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Par Samuel JOSEPH

Le jeune économiste haïtien, Etzer ÉMILE, a commenté minitieusement le budget de la République d’Haïti (2019-2020) adopté vendredi dernier lors d’un Conseil des Ministres qui a été réalisé à l’extraordinaire. Le gouvernement Haïtien prévoit l’enveloppe budgétaire à 198,7 milliards de gourdes, soit une hausse de 32% par rapport au budget réconduit.

Sur son compte officiel Tweeter et sa page Facebook, monsieur ÉMILE a exposé six (6) parmi les grands principes du budget pour faire cet exercice intellectuel aboutissant à la faillite de l’État Haïtien. Il a, par ailleurs, critiqué l’enveloppe de deux milliards de gourdes (2.000.000.000.00 G) allouée au Conseil Électoral Provisoire (CEP) car, prévient-il, il n’y aura pas d’élections d’ici au 30 septembre 2020.

En voici l’intégralité de son texte alors la rédaction du média en ligne « Le P’tit Journal » invite ses internautes et lecteurs (trices) à en dépister pour en savoir plus.

Les commentaires de l’économiste Etzer ÉMILE sur le budget 2019-2020.

Cette analyse du budget sera faite à la lumière de six parmi les grands principes du budget à savoir principe d’annualité, d’unité budgétaire, de spécialité budgétaire, d’universalité, d’équilibre budgétaire, de sincérité budgétaire et d’autres angles d’observation comme la publicité et l’application du budget-programme. Quelques autres faits importants viendront compléter cette analyse qui se veut succincte et non exhaustive.

a) Principes d’annualité;

b) Principes d’unité budgétaire, de spécialité budgétaire et de l’universalité budgétaire;

c) Principes d’équilibre budgétaire;

d) Principes de sincérité budgétaire;

e) De la publicité;

f) De l’application du budget-programme;

Autres faits à signaler.

Aucun apport des entreprises publiques dans le Budget;

Mesures de réduction de dépenses.

a) Principes d’annualité.

Ce principe consiste à fixer pour une année la durée de l’exercice. Par ce principe, toutes les opérations financières de l’année doivent être autorisées au préalable donc avant le début de l’année par l’Autorité budgétaire. Cependant, le Budget 2019-2020 est adopté en Conseil des Ministres le 5 juin 2020 pour l’exercice débuté le 1er octobre 2019 et qui doit se terminer le 30 septembre 2020. Il est difficile de voir la différence de planification des actions publiques qui vont changer la vie de la population. Ce Budget a déjà pris en compte, de fait, près de 2/3 des opérations financières de la période couverte.

b) Principes d’unité budgétaire, de spécialité budgétaire et de l’universalité budgétaire.

Ces principes qui supposent que respectivement (i) l’ensemble des recettes et dépenses de l’Etat se trouve de manière détaillée dans un même document ; (ii) tous les crédits autorisés dans le Budget doivent être affectés à une dépense déterminée en prenant en compte sa nature et sa destination ; (iii) toutes les recettes et toutes les dépenses se présentent dans le document sans compensation ni contraction. Ces principes sont globalement respectés. Toutefois, il faut noter un effort d’informer la population sur le financement monétaire pour cette année.

c) Principes d’équilibre budgétaire.

Le principe de l’équilibre budgétaire signifie que les dépenses doivent être couvertes par des recettes globalement équivalentes. Le budget de l’Etat peut se présenter avec un déficit mais son financement doit être clairement identifié dans le budget. Toutefois, au regard de la prévision sur les recettes, il est à se demander si le niveau de financement du déficit n’est pas prévu à la baisse. En effet, au 30 avril 2020, sur le site officiel du Ministère de l’Économie et des Finances (MEF), les recettes ont été collectées à 46 milliards de gourdes, ce qui représente une moyenne de 6.58 milliards par mois. Cependant, les prévisions de recettes pour l’exercice fiscal sont de 89 milliards. Ce qui laisse présager que, sur les cinq derniers mois, l’administration fiscale compte atteindre un niveau de 43.25 milliards, soit une moyenne mensuelle de 8.65 milliards de gourdes. Au niveau des documents publiés, il est noté que «la hausse (des ressources du budget) sera également soutenue par la poursuite des réformes au niveau des administrations fiscales et douanières portant sur le renforcement du contrôle fiscal, la rationalisation progressive des exonérations et l’amélioration de la productivité des services de recouvrement», il est aussi mentionné comme mesure nouvelle, non prorogée des lois de finances antérieures, un droit de teinte de véhicules de 10 000 gourdes, une amende de 20 000 gourdes pour les contrevenants, une augmentation des droits d’accises à partir de leur application sur les boissons alcoolisées (20%), les boissons non alcoolisées (10%), sur les cigarettes et tabacs (50%), et sur les véhicules dont la puissance est supérieure ou égale à 2200 cc (15%).

d) Principes de sincérité budgétaire.

Ce principe suppose l’exactitude des informations contenues dans la loi de finance et la rationalité dans les prévisions de recettes et de dépenses. Les ressources prévues de 198 milliards de gourdes semblent être chimériques dans ce contexte de ralentissement économique. D’une part, les recettes fiscales vues plus haut sont hypothétiques, d’autre part, la partie du financement ne rassure pas totalement. Le prêt de Taiwan pour la réhabilitation du réseau national de distribution de l’électricité de 9.67 milliards de gourdes qui est en attente de décaissement depuis deux ans est prévu dans les ressources. Le décaissement effectif et total de ce prêt n’est pas sûr avant le 30 septembre 2020. Une autre source de financement interne nommée «Syndication» de 167 millions de gourdes n’est pas définie dans le Budget Général 2019-2020. Il est à noter aussi que le support des partenaires extérieurs attendus est à hauteur de 37 milliards de gourdes qui sont constitués de 17,9 milliards de gourdes d’appuis budgétaires et de 19,1 milliards de gourdes au titre de dons et emprunts projets. Comment peut-on être sûr de recevoir 350 millions de dollars de support de l’international sur l’année avant le 30 septembre? Très hypothétique.

e) De la publicité.

Le principe de la publicité, signifie que les documents budgétaires sont portés à la connaissance de la population, lui permettant ainsi d’exercer un contrôle de la politique budgétaire du Gouvernement. Ce principe est respecté partiellement, car la loi des règlements qui nous renseigne de la qualité d’exécution du budget précédent n’a pas été publiée.

f) De l’application du budget-programme.

Depuis des années, la Société Civile (SC) sollicite de la part des autorités publiques, un Budget-Programmes. Un Budget-Programmes est la représentation sous forme chiffrée d’une action ou d’un groupe d’actions cohérentes d’une politique publique dans une perspective de moyen terme (supérieur ou égal à trois ans) tout en recherchant des finalités d’intérêt général avec des résultats mesurables à partir d’indicateurs dits de performance. La Loi du 1er février 2017 remplaçant le décret du 16 février 2005 sur le processus d’Élaboration et d’Exécution des lois de finances surnommée «Loi sur l’Élaboration et l’Exécution des Lois de Finances (LEELF)», prévoit la mise en place progressive d’un Budget Général de Programmes. Conformément aux dispositions transitoires des articles 111 à 116 de ladite loi, le Budget du Ministère de la Santé Publique et de la Population (MSPP) est présenté sous forme de Programmes Budgétaires. Par exemple, le MSPP répartit ses crédits budgétaires selon les Programmes suivants : Pilotage et Soutien à la Politique Sanitaire ou Administration Générale (6.4%), Prévention et Sécurité Sanitaire (71.2%), Offre et Accès aux Soins (22%) et Population (0.4%).

Autres faits à signaler.

Le payrol de l’État représente 53% de ses recettes.
Un ratio qui pèse lourd sur les marges de manœuvre du Gouvernement pour des actions pro-croissance à travers les investissements publics est la masse salariale/ressources domestiques. Pour cette année, le ratio est de 53.2%. Sur chaque 100 gourdes de recettes collectées plus de 53 gourdes sont réservées pour le paiement du personnel, ce qui est une dépense non compressible. Le solde primaire courant qui est la différence entre les recettes et les dépenses courantes hors paiement d’intérêt de la Dette affiche pour la première fois un chiffre négatif. Cela sous-entend que les recettes de l’État n’arriveront pas à couvrir les engagements récurrents de l’Administration.

Moins de ressources pour les institutions de contrôle et de lutte contre la corruption.

Les institutions de contrôle et de lutte contre la corruption ont reçu globalement des allocations plus faibles cette année. La Cour Supérieure des Comptes a vu son budget baisser de 53,88 % pour passer de 1,6 milliards de gourdes en 2017-2018 à 758,15 millions de Gourdes. Le budget de l’Inspection Générale des Finances (IGF) ainsi que celui de la CNMP ont diminué respectivement de 5.78% et de 14.35%. En ce qui a trait à l’UCREF et l’ULCC, les budgets sont pratiquement restés au même niveau en monnaie nationale, mais subissent une certaine diminution en valeur réelle.

Le service de la dette publique en monnaie nationale a augmenté de 43%.

Dans le budget 2017-2018, le service de la dette publique était autour de 14 milliards de gourdes. Pour cet exercice, il est de 20,1 milliards de gourdes réparties de la manière suivante : 10,9 milliards de gourdes au titre de la dette interne (envers notamment la BRH, BNC, ONA et Pension Civile) et 9,19 milliards de gourdes de la dette externe (principalement envers le Venezuela dans le cadre de Petrocaribe).

17 milliards de Gourdes pour le Coronavirus.

Dans ce budget, 17 milliards de gourdes sont prévus au titre de lutte contre la pandémie de COVID-19. A rappeler qu’environ 6 milliards de gourdes avaient déjà été décaissées, selon le rapport du Ministère de l’Économie et des Finances (MEF) publié le 31 mai dernier.

Hausse du budget de la santé et une baisse surprenante du budget de l’agriculture.

Comme prévu, le budget du MSPP est passé de 5,6 milliards en 2017-2018 à 21,6 milliards cette année soit une augmentation en monnaie nationale de 28,5%. Dans cette enveloppe, 16 milliards de gourdes sont réservées pour des investissements. Espérons qu’après le Coronavirus, ce secteur aura bénéficié de quelques investissements durables. Parallèlement, alors que des secteurs appellent à une plus grande mobilisation de ressources et des investissements plus importants pour renforcer l’agriculture nationale dans ce contexte de rareté de produits agricoles étrangers et de menace de famine, le ministère de l’agriculture a vu son budget en monnaie nationale baisser de 33% pour passer de 10 milliards de gourdes 2017-2018 à seulement 6.7 milliards de gourdes soit 3,4% du budget contre 6,9% précédemment. Est-ce un signe de désintérêt pour ce secteur?

Aucun apport des entreprises publiques dans le Budget.

Le budget 2019-2020 ne prévoit aucun financement en provenance des entreprises publiques et organismes autonomes qui ont pourtant l’obligation légale de fournir au trésor au public une partie de leur revenus. Ici, nous faisons allusion à des institutions publiques comme OAVCT, AAN, OFNAC, APN, ou des entreprises semi-publiques comme CINA, Moulins d’Haïti, NATCOM… Ces institutions à fort potentiel sont pour la plupart gérées de manière non-transparente et contribuent presque pas au budget de l’État.

Subvention à l’EDH et de produits pétroliers.

La subvention de l’EDH et des produits pétroliers atteignent 25,69 milliards de gourdes soit 18,05 milliards de gourdes pour l’EDH et 7,6 milliards de gourdes pour l’achat de produits pétroliers. Ce niveau de subvention dépasse le budget de tous les ministères à l’exception du Ministère des Travaux Publics, Transports et Communications.

Mesures de réduction de dépenses.

Depuis 2017, est introduit dans la gestion publique l’arrêté sur la réduction du train de vie de l’État. Cet arrêté a trouvé écho au niveau des dispositions sur les transactions budgétaires relatives à certaines dépenses bien spécifiques, que ce soit sur l’utilisation abusive et discrétionnaire de certains ordonnateurs, que ce soit sur le partage des informations nécessaires pour autoriser une transaction budgétaire. Ces mesures concernent les cartes de recharge téléphoniques, les cartes de débit, le perdiem, le parc automobile et aussi les charges relatives à l’entretien et à la réparation des véhicules de plus de 5 ans, déjà amortis sur le plan comptable.

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